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Mai 2003-mai 2009, d’une crise à l’autre

C’est un peu la lancinante question qui est présente à tous les esprits, sur tous les écrans de BlackBerry et toutes les paires de lèvres qui descendent piaffer sur la Côte in the bunker : 2009 sera t-elle une cuvée noire pour le Festival du cinéma? C’est drôle comme la presse est très oublieuse de ses propres analyses… Je revois encore les commentaires de journalistes durant les cuvées 2003/04. Il semble une éternité… A l’époque, la planète Terre (vous savez le bout de cailloux qui porte Cannes, son palais et l’industrie cinématographique) se remettait d’une autre crise économique, celle de l’après éclatement de la bulle internet, de l’après 11 septembre, de la guerre en Irak… Bref c’était pas la joie.

champagne bulles

Du coup les sous-sous venaient à manquer pour gérer le superficiel. Et nos amis envoyés spéciaux ne se gênaient pas, déjà, pour décrire cette ambiance de sobriété et de serrage de vis. Je revois très bien un sujet diffusé sur Canal +, caméra au poing dans les premiers jours sur la Croisette, sous la pluie, avec peu de monde dehors… Une ambiance rinçée et ce ton presque désespéré du journaliste, sur l’air de « tout fout le camp ma bonne dame » ou « ils nous ont pourri notre festival merde alors!‘. Comprendre, en langage cannois : moins de champagne et de fiestas nocturnes, moins de déjeuners de presse classieux, moins de staaaaaaars américaines et pour des séjours moins longs. Le « moins » conjugué à tous les étages, le low cost en adaptation festivalière.

De fait, pour cette cuvée 2009 dite « de crise », ça repartirait comme en 40. Et les moindres signaux comptent, qui pourraient faire mentir la destinée! On va jusqu’à comparer entre 2008 et cette année, les dépenses logistiques. Celle des coiffeurs par exemple, comme le note sur son compte Twitter le projet SarbaCannes : « Une armée de 19 coiffeurs Jacques Dessange débarque sur Cannes pour le festival. Pas de crise et le même budget qu’en 2008« . C’est rassurant, capillairement parlant. Bientôt, on va comparer le nombres de palettes de feuilles blanches pour la photocopieuse dans la salle de presse! Ou la qualité des petits savons cadeaux dans les hôtels.

Quelques questions candides en passant :

  • d’une crise à l’autre, qu’a appris la filière cinéma sur le financement de ses propres agappes?
  • Cannes est-il un bon thermomètre de l’économie globale?
  • un journaliste de cinéma peut-il s’intéresser au travail de ses collègues et confrères des services économie?

Nul doute qu’on ne va pas organiser une conférence sur la Croisette sur ce thème si peu sexy. Encore que, il ne faut pas désespérer : la partie marché du film, le festival pro dans le festival, peut parfaitement assumer ce genre de débat en 2009. Pourquoi? Parce qu’il y a un peu le feu au lac, et que les professionnels du cinéma -comme ceux de la musique et des médias- sont tout aussi secoués sur leurs fondements et fondamentaux. Concurrence du web pilleur, crise de financement, crise de consommation… tous les indicateurs sont passés au rouge.

Et pourtant… il faut aussi garder en tête ces chiffres et signaux assez paradoxaux sur le cinéma français, rappelés par exemple par le Journal des Finances (30/4). Les Français ont-ils vraiment une envie furieuse d’oublier la crise devant la toile? Ou n’ont-ils pas plus simplement pas encore répercuté leur serrage de ceinture sur ce budget? A débattre entre analystes.


2 Réponses to “Mai 2003-mai 2009, d’une crise à l’autre”


  1. 12 Mai 2009 à 8 h 01 mi

    On oublie, en effet, que le festival cache le marché, sans lequel il n’y aura pas de films dans trois ans. Or, tout le monde sait pertinnement bien que les films se feront. Ils vont lorgner sur les budgets, être plus sélectif dans le choix de projets etc. Mais des films il y en aura. Pour savoir ce qui se passe, vaut mieux lire « Le film français » ou Screen International que des critiques de cinéma (sans méchanceté aucune – a chacun sa spécialité). Y a t-il une crise? Oui – et alors? Comme vous le dites, on est passé par là déjà.

  2. 2 kkritik
    12 Mai 2009 à 8 h 14 mi

    Yes Michaël. Ca m’a toujours frappé cette dichotomie festival/marché. La visite des étages des palaces et des suites business en apprend plus que tout le reste sur cette industrie, ses acteurs, ses projets.

    La particularité que je vois à cette « crisis mood » 2009 est peut-être, comme sur d’autres fronts culturels, à la superposition des problématiques. J’en vois au moins trois :
    – une crise de fond : celle des modes de diffusion du cinéma face à l’internet et à la piraterie; du mode de consommation de la jeunesse face au « cinéma de salle »;
    – une crise de forme : justifier des agapes à paillettes quand tout le pays se sert la ceinture;
    – une crise de financement amont : comment monter des projets premium, notamment dans les secteurs porteurs de la science fiction et du fantastique (coûteux en effets spéciaux) ou sur les affiches lourdes en stars;
    – une crise de financement aval : comment inventer encore des cash machines quand les supports de rentabilisation perdent du terrain (DVD vieilli, BlueRay pas glop, etc.), que le public semble gavé par la sur-maketisation des grosses productions;

    Ca fait, cela dit, de beaux sujets de conversation aux bars des hôtels ou sur le sable de la plage voisine 😉


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